La notion de l'upcycling dans le domaine de la mode
Article n°2- Mars 2025
« Tout est changement, non pour ne plus être mais pour devenir ce qui n’est pas encore. » Epictète
Cette citation du célèbre philosophe trouve tout son sens dans le concept d’upcycling, qui prend ses racines dans les années 1940 en Angleterre.
L’upcycling ou “surcyclage” en français signifie “recycler vers le haut”. Ce processus permet d’offrir une seconde vie à des matériaux voués à être jetés. De plus il est étroitement lié à la revalorisation des produits ainsi il joue un rôle essentiel dans l’économie circulaire en favorisant la réduction des déchets et l’optimisation des ressources.
Angleterre: Les prémices du concept d'upcycling
La seconde guerre mondiale entraîne une pénurie de vêtements et une hausse des prix de ceux qui restent dans les boutiques. De plus, les fabricants de vêtements britanniques doivent produire des articles nécessaires à l’effort de guerre tels que des uniformes et des parachutes.
C’est dans ce contexte qu’apparaissent des campagnes comme celle ci-contre, promulguée par le gouvernement britannique encourageant les citoyens à “Go through your wardrobe” ce qui signifie examiner ses vêtements pour voir ce qui peut encore être utilisé, réparé ou transformé, dans l’esprit de la campagne Make Do and Mend (Faire avec et raccommoder).
De plus, des cours du soir ont été mis en place pour apprendre aux gens à fabriquer de nouveaux vêtements à partir de d’anciennes pièces, de draps ou de torchons plutôt que de les jeter.
Un court métrage à ce sujet a été réalisé par Michelle Kirby “Clothes Rationing in Britain: Make Do and Mend”.

Reiner Pilz: La naissance du terme “Upcycling”
En 1994, un article mentionnant le mot upcycling pour la première fois paraît dans le magazine britannique “Salvo”. Il s’agit d’une interview de Reiner Pilz, un ingénieur mécanique allemand, celui-ci critique le recyclage traditionnel qu’il appelle “downcycling” en déclarant: « Ils détruisent les briques, ils détruisent tout. Ce dont nous avons besoin, c’est de l’upcycling, où les vieux produits reçoivent plus de valeur, pas moins. » Dès lors, l’upcycling incarne une technique qui permet à un produit de gagner de la valeur au lieu d’en perdre.
L’émergence de l’upcycling dans la mode

Avant même l’apparition du terme upcycling, Dapper Dan marquait l’histoire de la mode à Harlem dans les années 1990. Ce designer visionnaire récupérait et transformait des vêtements et accessoires de luxe, modifiant leur coupe et leur style pour créer des pièces uniques. Considéré comme l’un des pères du style hip-hop afro-américain, il détournait tissus et motifs de grandes marques, apposant parfois de faux logos sur ses vestes et sacs de voyage. Sa boutique proposait des créations inédites – fourrures, vestes en cuir, accessoires sur mesure – prisées par des figures emblématiques comme Mike Tyson, LL Cool J ou Eric B. & Rakim. Le New York Times qualifiait son travail de « contrefaçon élevée au rang d’art ».
Au 21ᵉ siècle, l’upcycling s’impose comme un choix éthique face aux dérives de la fast fashion. La surproduction textile dans des conditions de travail précaires, l’impact environnemental du coton, la pollution liée au denim ou encore la surconsommation d’eau préoccupent de plus en plus les consommateurs. En réponse, la mode durable gagne du terrain, favorisant également une approche unisexe où les vêtements peuvent être réutilisés et adaptés d’un genre à l’autre.
Loin d’être une tendance récente, l’upcycling a déjà marqué l’histoire de la mode. Un exemple emblématique est le pull en chaussettes de Martin Margiela, présenté lors de sa collection automne-hiver 1991-1992. Ce vêtement, composé d’anciennes chaussettes assemblées en patchwork, illustre parfaitement l’idée de transformation et de réinterprétation des matériaux existants.
Si certaines maisons de couture s’approprient cette démarche, de nombreux créateurs indépendants et artisans locaux en font également leur signature. En utilisant des textiles anciens ou en transformant des pièces de seconde main, ils proposent une mode plus responsable et authentique. Il est essentiel de les soutenir, car ils participent à une consommation plus durable tout en valorisant le savoir-faire artisanal et l’innovation créative.
L’’upcycling s’impose comme une alternative durable à la fast fashion, porté par des créateurs de renom comme par des artisans locaux. Sur le territoire lyonnais, des créateurs comme Jooj, Maison Gaudy, Angovo et Marthe Duval s’engagent dans cette démarche.. Mais peut-il réellement transformer l’industrie de la mode à grande échelle ? Ses limites résident dans la disponibilité des matériaux, le coût de production et son accessibilité.
Jusqu’où peut-il aller sans rester une niche ?
Par Alix MINOT
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